Page:Peguy oeuvres completes 02.djvu/292

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lutionnaire française était lésée dans ses plus anciennes ressources ; comment un jaurésisme universel pendant près de quatre ans sévit ; car ce n’est pas assez de dire qu’il régna ; c’est-à-dire un opportunisme politique et social sans la grandeur et sans la compétence des anciens opportunistes ; comment l’anarchisme lui-même ne resta pas indemne ; ayant reçu beaucoup d’atteintes, ayant admis beaucoup de contaminations politiques et littéraires ; comment un petit bonhomme populaire et plaisantin peut devenir un grand tyran sans que l’on s’en aperçoive ; comment la popularité du césarisme fait le plus dangereux aboutissement des démocraties ; combien il est aisé d’établir une autocratie en France, pourvu que l’on respecte certaines formes, quitte à ne respecter aucune réalité, aucune liberté ; comment la République, à force de se garder contre les invasions des césarismes extérieurs, d’une manière pour ainsi dire professionnelle, était condamnée à ne pas voir monter les intravasions du beaucoup plus dangereux césarisme intérieur ; mais comment il restait encore quelques citoyens libres ; comment la délation, qui avait toujours été dans la pratique des gouvernements et des partis, fut organisée en théorie officielle, gouvernementale, politique, parlementaire, et censément républicaine ; ainsi comment la franc-maçonnerie, qui en des temps héroïques avait rendu tant et de véritables services à la République, à la liberté, à la libre pensée, d’un seul coup, ayant trahi la liberté, la libre-pensée, faillit faire perdre à la République tout l’avantage qu’elle avait jadis contribué à lui faire obtenir ; et à la libre-pensée tous les avantages qu’elle avait jadis contribué à faire obtenir à la pensée libre ; comment dès le