Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/233

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gonistes de nos hontes nationales il n’y a aucun Juif. Qu’est-ce que l’on dirait si Jaurès était juif. Qu’est-ce que l’on dirait, surtout, si Hervé était juif. C’est-à-dire, précisément, si un Juif avait été lâche le vingtième de ce que Jaurès l’a été, si un Juif avait dit contre la patrie, française, avait prononcé, contre notre patrie, le vingtième des monstruosités que notre compatriote Hervé a si superbement sorties, qu’est-ce qu’on aurait dit. Et pareillement qu’est-ce que l’on dirait si Thalamas était juif.

Pour prendre un exemple d’épisode, tout petit, mais d’autant mieux dessiné peut-être, d’autant mieux caractérisé, d’autant mieux (dé)limité, d’autant plus aisé, plus facile à saisir, qu’est-ce qu’on aurait dit dans un débat récent, dans un monde très spécial, si c’eût été M. Bataille qui eût été juif et madame Bernhardt qui ne l’eût pas été.

Dans l’affaire Dreyfus même, sans y revenir, ou plutôt sans y entrer, dans l’État-Major même du dreyfusisme et de l’affaire Dreyfus il est fort notable que ce sont les Juifs, les grands Juifs qui ont encore le moins faibli. L’exemple de M. Joseph Reinach est caractéristique. On peut dire que dans l’affaire Dreyfus, dans l’État-Major de l’affaire Dreyfus et du parti dreyfusiste il représentait en un certain sens, et même pour ainsi dire