Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/269

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est une opération essentiellement volontaire, intentionnée. Quand j’outrage, je m’y prends évidemment d’une tout autre encre. Je n’ai outragé que trois ou quatre fois dans ma longue carrière. Je n’ai jamais outragé de gaieté de cœur. Je sens, je sais trop bien tout ce qu’il y a d’impie dans tout outrage, même juste, même inévitable, même commandé, même dû. Je n’ai jamais outragé que de très dangereux ennemis publics. Ces quelques réprobations n’ont jamais été ni révoquées, ni contestées par personne.


Tout autre est l’offense. Ici on ne sait pas bien où l’on va. Une offense peut échapper. Une offense peut être malentendue. On peut offenser sans le vouloir, et même sans le savoir. On peut offenser non seulement sans le faire exprès, mais même sans s’en apercevoir. Plus l’offenseur est cher, et plus grande est l’offense. Si j’ai fait à Halévy cette offense que je n’ai point vue, je lui en demande pardon. Si j’ai offensé Halévy dans mon dernier cahier, je lui en fais, par les présentes, réparation.


Je lui en demande pardon sans arrière-pensée. J’ai trop le respect et le goût de la guerre pour croire qu’il faille et que l’on puisse faire la guerre à tort et à travers, pour me résoudre à faire une offense fratricide, une guerre impie. Halévy et moi, ou enfin Halévy et Péguy, nous sommes amis. C’est déjà tout. En outre