Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/438

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sont infiniment plus pétris, tenus par la charité, infiniment plus pétris de (la) charité, infiniment plus mordus de charité que les criminels, que les cruels ne sont mordus de cruauté. L’empreinte, plus que l’empreinte, la blessure, la morsure, la nourriture est infiniment plus profonde, plus ineffaçable. (Plus grave). De la charité que de la cruauté. Le saint est infiniment plus marqué que le cruel. Il est infiniment plus dévoré de charité que le cruel n’est mordu de cruauté. Son cœur consumé d’amour. Son cœur dévoré d’amour. On pourrait presque dire que le saint est plus irrécusablement victime de sa charité que le criminel, que le cruel n’est victime de sa cruauté.

§28. — C’est pour cela que Corneille était tiré de toutes parts vers Polyeucte. Il était conduit, il montait de toutes parts vers Polyeucte. Par toute cette grâce dont son œuvre est pleine ; par toute cette charité, dont son œuvre est pleine ; par tout son héroïsme ; par vingt autres montées.

§29. — On parle toujours de l’ordonnance de Racine. L’opinion commune est qu’une ordonnance règne dans la vie et l’œuvre de Racine et qu’elle ne règne pas, au même titre et tant s’en faut, dans la vie et l’œuvre de Corneille. Qu’il y a une ordonnance dans la vie et l’œuvre de Racine. Il faut s’entendre. Sur ce mot. Sur le sens de ce mot. Racine est administré avec une certaine ordonnance impeccable intelligente qui règne sensiblement dans la construction de la vie, presque souverainement dans la construction de l’œuvre, qui se poursuit, (mais alors souverainement), jusque dans le moindre