Page:Peguy oeuvres completes 06.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Cette première fois qu’elle sortit charnellement, temporellement des lèvres d’homme de mon fils.

Et dans la pointe de la pointe, dans cette pointe même il y avait une pointe.

Et c’étaient ces trois ou quatre mots, Notre Père qui êtes aux cieux, non plus seulement comme un texte, non plus seulement dans leur texte.

Mais dans leur source même.
Dans leur invention et dans leur bourgeonnement.
La première fois que mon fils les prononça sur cette montagne.
Les prononça, les fit sortir de ses lèvres d’homme.

La première fois qu’elles sortirent réellement, temporellement, charnellement,

De ces lèvres de tendresse.

Et il était debout sur cette montagne qui sera célèbre dans les siècles des siècles.

Sur cette montagne de la terre des hommes au-dessus de cette vallée qui allait en descendant.

Notre Père qui êtes aux cieux, il inventa cela.
Il était avec eux, il était comme eux, il était un d’eux.

Notre Père. Comme un homme qui jette un grand manteau sur ses épaules,

Tourné vers moi il s’était revêtu,
II avait jeté sur ses épaules
Le manteau des péchés du monde.

Notre Père qui êtes aux Cieux. Et à présent derrière lui le pécheur se dérobe à ma face. Et voici comme je vois, voici comme je suis forcé de les voir. Voici comment je me représente ce cortège.

Tout part d’un point, qui est tourné vers moi, de l’extrême pointe d’une pointe.