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DES SAINTS INNOCENTS Et les prières des moines qui marquent toutes les

heures du jour. Et les heures de la nuit. Et le Benedicite qui se dit pour se mettre à table. Devant une bonne soupière fumante. Toutes, enfin toutes. Et il n’en reste plus.

Or je vois la quatrième flotte. Je vois la flotte invisible. Et ce sont toutes les prières qui ne sont pas même dites, les paroles qui ne sont pas prononcées.

Mais moi je les entends. Ces obscurs mouvements du cœur, les obscurs bons mouvements, les secrets bons mouvements.

Qui jaillissent inconsciemment et qui naissent et incon- sciemment montent vers moi.

Celui qui en est le sièg^e ne les aperçoit même pas. Il n’en sait rien, et il n’en est vraiment que le siège.

Mais moi je les recueille, dit Dieu, et je les compte et je les pèse.

Parce que je suis le juge secret.

Telles sont, dit Dieu, ces trois flottes innombrables. Et

la quatrième. Ces trois flottes visibles et cette quatrième invisible. Ces prières secrètes dont un cœur est le siège, ces

prières secrètes du cœur. Ces mouvements secrets. Et assailli aussi efl’rontément, assailli de prières et de

larmes, Directement assailli, assailli en pleine face

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