Page:Peguy oeuvres completes 08.djvu/351

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C L I ment de sa matière et telles sont les perspectives et les optiques temporelles : nous savons très bien que la première fois qu'il a fait un peu de bruit dans le monde c'était au siège de Toulon, et qu'il y avait la batterie des hommes sans peur.

En somme nous savons tous, dit-elle, qu'il est ne à Besançon, fil nous Ta assez dit) ; mais nous savons aussi, nous savons très bien qu'il était à Brienne. Et aussi nous savons très bien qu'il faisait des vers en nourrice ; et certainement avant. Il bénéficie ainsi de trois ou quatre recouvrements chevauchant de l'un sur l'autre, portant en avant de l'un sur l'autre, antici- pant de l'un sur l'autre. Et c'est ainsi qu'on emplit et même qu'on déborde un siècle.

Les plus grands hommes, (Lavisse, dit-elle], n'arrivent jamais qu'à être et à paraître cinquante ans. Et encore c'est long. Et ils ne font jamais que des quinquagé- naires et des cinquantenaires. Quand Lavisse est entré, comme élève, à l'École Normale Supérieure, il était un jeune homme, dit-elle, il ne faisait que commencer. A peine. Et quand nous avons fêté le cinquantenaire de l'entrée de M. Lavisse à l'École Normale Supérieure, il était un homme fini. Vous-même, dit-elle, vous petit, (me dit-elle), vous n'irez pas même jusque-là. Pas même un demi-siècle. Depuis quinze ans que vous ramez sur cette galère, vous vous sentez à bout tous les jours ; et il vous semble qu'il y a une éternité. Que ça dure. Et vous n'en êtes encore qu'à la quinzième série de vos cahiers. Vous ne vous voyez pas dans

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