Page:Peguy oeuvres completes 08.djvu/350

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OEUVRES POSTHUMES avait connu cette merveilleuse gageure, cette contra- diction dans les termes : l'Espagne napoléonienne. Enfant il n'avait pas vu seulement des revues ; et des retours immédiats de batailles ; et des départs immé- diats pour d'autres batailles ; et pour ainsi dire des interveilles de batailles; et des interveilles de vic- toires. Il avait vu ce qui est plus profond et pour ainsi dire plus vrai : des bagages et des cantinières. Et il avait été lui-même un bagage dans l'encom- brement de ces bagages. Et quand l'âge venant préci- sément au tournant de la cinquantaine, au tournant de son demi-siècle, à la borne de tournement de sa demi-carrière l'intérêt pouvait commencer à diminuer, et l'image à disparaître, par un deuxième coup de for- tune, encore plus extraordinaire et doublant le premier, il eut ce merveilleux coup de retournement, ce mer- veilleux coup de doublement, juste le coup d'État et Napoléon le troisième, qui lui fournit instantanément et un deuxième recul, et le repoussement, et la colère, et l'antithèse et tout. Et tout cela aussi tout rendu. Juste assez de présence, juste assez d'absence. Juste assez d'empreinte, juste assez de recul, de toute cette grande fortune temporelle et chronologique je ne retien- drai, dit-elle, que ce qu'elle a de proprement curricu- laire. Il était si bien fait pour sa matière, dit-elle, si bien apparenté à sa matière, si entré dans sa matière et il en sortait tellement d'un mouvement continu et comme un nouveau bourgeon que malgré nous nous faisons remonter son commencement au commence-

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