Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/195

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motion en promotion. Les deux tiers de l’Enseignement Supérieur sont avec nous, tout ce qui est plus préoccupé de travailler que de venir à Paris.

Là n’est pas leur force. On ne saurait trop le répéter, leur force n’est pas dans l’enseignement. Leur force est dans une sorte de maçonnerie extrêmement bien organisée ; leur force est une sorte de force de gouvernement à la fois officiel et occulte. Dans une attention constante et sournoise à accaparer, à usurper tout ce qu’ils peuvent du gouvernement de l’État. Et non seulement de l’État, mais tout ce qui est corps, situation, position, établissement temporel-spirituel. Mais là leur force est immense, on ne saurait trop le répéter, et ménage de cruelles surprises à ceux qui ne veulent pas la voir, ou qui ne veulent pas la voir toute, qui ne veulent pas croire qu’elle est immense. Un exemple récent l’a durement montré. S’il y avait un corps que l’on croyait qui avait échappé à la domination du Parti Intellectuel, c’était bien l’Académie Française. Or l’Académie Française voulait l’année dernière, enfin dans le courant de la dernière année scolaire, fonder un grand prix qui honorât les lettres françaises, qui marquât expressément le rang que les lettres doivent occuper dans une société comme la nôtre. Le Parti Intellectuel mal rassemblé, ne put arriver à temps pour empêcher la création du prix. Il se ressaisit vite. La tyrannie est toujours mieux organisée que la liberté. Le Parti Intellectuel décida que le prix ne serait pas attribué. On sait assez que le Parti Intellectuel n’a pas de plus grand ennemi que les Lettres : les Lettres grecques ; les Lettres latines ; les Lettres françaises. Le Parti Intellectuel résolut que le prix ne serait pas attribué.