Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/209

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comme il disait. Toutes les fois que je rencontrais non pas un ami commun, je ne dis pas un ami commun à Laudet et à moi, nous n’en avons naturellement pas, mais un camarade commun, dans ce grand Paris où tout le monde se connaît, une connaissance commune, à Laudet et à moi, à le Grix et à moi, je lui disais : Laudet me prépare un coup. Il a tort. Ça l’amuse beaucoup. Il a tort. Ça l’amuse avant. Ça ne l’amusera pas autant après. Vous devriez lui dire qu’il a tort. Lui expliquer. Qu’il me laisse tranquille. Moi je ne sais pas me battre. Je ne suis bon qu’à travailler. Je n’aime que la tranquillité. Je sacrifierais tout à ma tranquillité. Je suis écrivain. Je ne suis pas un militant. Et puis je ne me bats pas comme ces messieurs. Je suis un homme de paix. Je suis très capable de donner un mauvais coup. Avec moi on sait bien quand on commence. On ne sait pas quand on finit. Comment on finit. M. Laudet peut se faire embarquer bien loin. Il faut croire qu’aucun de ces avis au porteur n’est arrivé à sa destination. J’ose affirmer ici que M. Laudet n’a pas un (seul) ami. Si M. Laudet avait un seul ami, on l’eût averti, on l’eût avisé des risques qu’il courait, des risques de l’opération qu’il préparait. Tout le monde autour de lui savait à quoi s’en tenir, savait à quoi il s’exposait. Lui seul ne l’a point su. Les grands n’ont point d’amis. Lui ne me connaît que depuis quelques mois. Il ne connaît généralement les lettres que depuis quelques mois. (Il ne connaît, enfin je sais ce que je veux dire). Mais il est entouré de gens qui me connaissent depuis quinze ans, qui avaient vu d’autres exemples, connu d’anciennes histoires, qui pouvaient, qui devaient le mettre en