Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/243

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cela, il faut qu’on le sache bien de part et d’autre, chez les uns et chez les autres, c’est pour cela que nous ne renierons jamais un atome de notre passé. Nous avons pu être pécheurs. Nous l’avons été certainement beaucoup. Pro nobis peccatoribus. Mais nous n’avons jamais cessé d’être dans la bonne voie. Notre préfidélité invincible, notre jeune préfidélité aux mœurs chrétiennes, à la pauvreté chrétienne, aux plus profonds enseignements des Évangiles, notre obstinée, notre toute naturelle, toute allante préfidélité secrète nous constituait déjà une paroisse invisible.

Nous avons pu être avant la lettre. Nous n’avons jamais été contre l’esprit.

C’est donc par une inintelligence profonde, par un grossier contresens, justement celui qu’il ne fallait pas faire, comme toujours, que M. Laudet, adoptant, résumant un contresens beaucoup plus étendu de M. le Grix, écrit : « il remémore aussi comment l’auteur, après avoir été dreyfusard et socialiste, en était arrivé à reconnaître la nécessité d’une renaissance du spiritualisme et à se soumettre à une discipline mystique restaurée. » Si j’ai dit quelque chose au contraire, depuis deux et trois ans, et qui exprimait, qui représentait, qui traduisait ce qui s’est passé depuis vingt ans, c’est que notre dreyfusisme et notre socialisme était profondément spiritualiste, — (bien que je n’aime guère à employer ce mot, déconsidéré par Cousin et par l’école cousinienne, qui fut une ancienne école intellectualiste), — et qu’il était profondément mystique et profondément une discipline mystique. Quant à restaurer une discipline mystique, Dieu merci on n’a pas besoin de nous. Il ne s’agit point de restaurer un