Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/277

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Saint Louis était le maître et le modèle de Jeanne d’Arc. Au sens que je veux dire saint Louis était le modèle de Joinville. Exactement dans le même sens Jeanne d’Arc est mon modèle, puisque j’ai entrepris de consacrer tout ce que j’ai à la représentation de cette grande sainte, et c’est Joinville qui est mon maître. Mutations faites, et il y en aurait peut-être bien peu à faire, en pensée, en intention, en esprit ma situation envers Jeanne d’Arc est exactement celle de Joinville envers saint Louis. Je veux me classer, au rang que je pourrai, dans la grande, dans la haute lignée de nos chroniqueurs et de nos témoins. La question n’est pas de savoir ce que nous valons, — nous valons tous peu, — mais la question est de savoir ce que nous sommes. Et ce que nous faisons. Toute la question est de l’attachement et de la fidélité que nous avons à ces grands modèles. Toute la question est de savoir ce que nous en faisons. Toute la question est du portrait, de l’histoire, de la représentation que nous réussissons à en donner. Joinville aussi était pécheur. Ce n’est pas cela que nous lui demandons, ce n’est pas de cela que l’on parle. Ce que nous lui demandons, c’est ce qu’il a fait de saint Louis. Quel portrait il nous en a laissé. Quelle fidélité de représentation il a gardée. Quelle sûreté. Quelle profondeur de représentation, de reproduction il a atteinte. Quelle gravité, quelle profondeur il a obtenue. C’est cela que nous lui demandons. Quel saint Louis il nous a fait, il nous a rendu, il nous a laissé. Et parce qu’il nous a légué un saint Louis dans le plein de son être, dans le plein de sa sainteté, pour ainsi dire dans le plein de son portrait nous trouvons que c’est très bien ainsi ; que c’est très