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renoncé à la parole. Connaissez-vous quelque chose de plus grand sous le soleil ?

Maintenant, Monsieur, voyons le sort que la loi a fait à l’écrivain.


V


Je commence par déclarer que si jamais quelqu’un, n’importe qui, n’importe où, a professé pour la loi de son pays la religion du bon citoyen, je crois encore avoir le droit de mettre une enchère sur celui-là, car j’attache au culte de la loi, non pas seulement au culte forcé, mais au culte volontaire, une condition de vie et de mort pour la démocratie.

À qui veut être libre, je dirai toujours : Respecte la loi ! car en dehors de la loi, il n’y a pour maintenir l’ordre que le sabre ; et à qui veut être fier, je dirai encore : Respecte la loi ! car en la respectant de toi-même, tu la votes une seconde fois au fond de ta conscience ; tu montes en quelque sorte au rang de législateur. Aussi je la respecte tellement pour mon propre compte, et d’un respect tellement forcené, que souvent je me fais peur à moi-même.

La loi, toutefois, n’est pas fille du hasard ; elle a une mère ici-bas, et cette mère, ai-je besoin de la nommer ? c’est l’intelligence. L’intelligence garde sur sa fille, reine muette du pays, sa prérogative maternelle de bon conseil. La loi, d’ailleurs, reconnaît la première que, perfectible par nature comme toute chose humaine,