Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/15

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le patriotisme ordonnait de résoudre vite, sans tapage et sans phrases, se trouve portée en appel des Chambres devant le pays, soit que le pays l’impose à la Chambre actuelle par un grand mouvement d’opinion, soit que la Chambre s’obstinant, la question devienne purement électorale.

C’est devant le pays qu’on nous appelle : il faut donc que le pays sache toute la vérité avant de prononcer. Si douloureux qu’il soit de tirer de l’oubli des atrocités dont l’horreur éclabousse tant de choses respectées, on l’a voulu, c’est dorénavant un devoir d’instruire l’opinion. À chacun sa tâche : nous accomplirons la nôtre.

Nous allons raconter cette épouvantable semaine de Mai, qui fait une tache rouge dans notre histoire. Des actes de rage impitoyable accomplis à cette époque, les uns, ceux de l’insurrection, ont été mille fois exposés : on les connaît ; il est inutile d’y revenir. Les autres, ceux de la répression, ne vivent que dans la mémoire des milliers d’hommes qui les ont vus. Nous écrirons cette moitié de l’histoire encore à faire.

On devine dans quel esprit nous accomplirons notre tâche : il ne s’agit pas ici de se jeter des crimes et des cadavres à la tête. Devant la guerre civile, nous ne ressentons et nous ne voulons propager qu’une haine, celle de la guerre civile. C’est elle seule qui allume chez les hommes ce vertige de feu et de sang où toute notion d’humanité disparaît. Est-ce qu’à toutes les époques de grands bouleversements et de grands malheurs, quels que fussent le caractère et l’état de civilisation des peuples, on ne les a pas vus ravagés par ces fièvres chaudes endémiques ?

Prenez les actes qui ont marqué et suivi la chute de la Commune ; et dites si l’on peut juger, sur ces actes terribles, une partie quelconque de la nation.