Page:Pelletan - Le Monde marche.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

est vanité, curiosité d’esprit, tentation, perdition. À aimer ? aimer quoi, sur ce bourbier de passage ? la patrie, par hasard ? Il élève précisément un mur entre elle et lui pour renoncer à tout jamais à la gloire de la servir. Patrie ! vanité aussi, figure mensongère de la vraie patrie, de la cité de Dieu, là-bas, là-haut, je ne sais où, enfin, derrière la vallée de Josaphat. Aimer une femme ? la femme ! grand Dieu ! la fille d’Eve, toujours Eve par quelque côté, toujours l’oreille inclinée à la parole du serpent ! Il épuiserait plutôt l’eau de son bénitier à faire le signe de croix. Si jamais, par mégarde, elle venait à égarer son pas sur le sol pudique qu’il bat régulièrement chaque jour du bruit alternatif de sa sandale, il irait chercher un fagot pour le brûler à la place encore fraîche où ce pied de damnation aurait passé. Aimer enfin la famille ? Mais qu’est-ce que la famille selon la chair ? une distraction du salut, un détournement d’affection un vol à Dieu un reste de volupté, un fond de lie du vas infirmius du péché originel. Le célibat, voilà la perfection. L’eunuque, voilà le parfum agréable au Seigneur.

Ah ! vous avez bien choisi votre livre, j’en conviens, pour prendre texte de sonner le glas de la civilisation. Le moine prosterné nuit et jour devant l’image du crucifié, un coup de lance au côté, devait écrire ainsi, et si la tombe à son tour pouvait parler, elle répéterait mot pour mot la même doctrine.

Avez-vous vu dans la galerie du Louvre une espèce