propriété. L’homme garde sa femme et la femme son enfant. La famille reste groupée autour du premier père en date, du patriarche ; à la longue elle multiplie, et en multipliant, elle constitue la tribu.
La tribu garde en commun le troupeau, et par ce motif le possède en commun. Or, comme la chair sur la braise est, au temps d’Homère, le fait courant de la nourriture, la table commune est de rigueur ; car on ne mange pas un mouton, et à plus forte raison un bœuf, tête à tête, en petit comité, du jour au lendemain. La tribu seule, convoquée à une même table, peut le consommer tout entier, en temps voulu, sans perte ni déchet. De là l’institution du repas public dans l’antiquité, et partout, dans l’antiquité, de l’andrie à Sparte, du convivium à Rome, de la phytidie en Crète et de la pâque à Jérusalem. L’institution a survécu sans doute à la tribu, mais elle n’en a pas moins pour cause première la nécessité de dévorer en un tour de main un repas qui tomberait autrement en dissolution au premier coup de soleil.
La vie commune trouve à cette époque de pauvreté d’autant plus de facilité d’application, que le pâtre fait partout la monnaie du pâtre, et que l’histoire constate de l’un à l’autre une seule différence : l’inégalité de force physique. Or, cette inégalité est peu de chose, à tout considérer ; ce qui différencie l’homme, ce n’est pas le plus ou moins de vigueur, c’est l’intelligence. Mais l’intelligence n’existe véritablement qu’en pleine civilisa-