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Page:Pelletier - Mon voyage aventureux en Russie communiste, 1922.djvu/104

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mon voyage aventureux

de l’heure, il reste donc vrai que les Russes se couchent fort tard et se lèvent de même. De dix heures à midi, on sert le premier déjeuner dans la salle à manger de l’hôtel « Luxe ». On s’achemine d’abord vers un petit bureau où on présenté sa carte d’alimentation ; la préposée vous la prend et coupe le numéro correspondant au quantième du mois : elle vous remet en échange un ticket qui donne droit au repas. Une fois par semaine on touche des cigarettes ; j’ai touché en outre deux savonnettes et une livre de bonbons que j’ai accueillis comme bien on pense avec un grand plaisir. Muni de son ticket, le pensionnaire va s’asseoir à table. Une bonne lui prend le papier et lui remet en échange une assiette garnie d’un morceau d’omelette, d’un morceau de beurre et d’un carré de gruyère. Je mange rarement le beurre qui est rance presque toujours. Alors mon voisin me dit : « Elle ne mange pas le beurre, c’est une menchévik ! » Pour corriger sa mauvaise impression je mets le beurre sur son assiette : « Mangez, vous serez doublement communiste ! »

Non seulement il ne faut pas récriminer sur la nourriture, ce qui après tout n’est que de la politesse ; mais il est de bon ton de la manger, ce qui tout de même est excessif. Les camarades sont un peu puérils à cet égard de mêler la politique à ces questions de mangeaille. J’ai remarqué que deux anarchistes recherchent ma société à table, non