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Page:Pelletier - Mon voyage aventureux en Russie communiste, 1922.djvu/117

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en russie communiste

qui ne sauraient être pour le régime un sérieux danger. D’ailleurs je suis une intellectuelle et je croirais manquer à l’honneur en faisant une dénonciation.

Tout ce monde vit misérablement ; la mère est coiffée d’un chapeau à brides dont l’usage prolongé a fait une galette informe. Si vous saviez, me dit-elle, à quelles besognes nous sommes obligés pour vivre. Nous ne travaillons presque plus en notre science ; on n’a pas le temps. Le Gouvernement ne nous donne rien ou à peu près.

Dans cet établissement on ne fait qu’attendre la contre-révolution, je m’en rends compte. Combien d’intellectuels, en Russie, sont dans ce cas ; ils n’ont vu en la dictature du prolétariat que l’invasion des barbares. C’était bien un peu cela, à vrai dire : en mettant à part les grands chefs qui sont des intellectuels, beaucoup de communistes n’ont qu’une culture primaire. Leur ignorance fait d’eux les adversaires d’études dont ils ne comprennent pas la portée, seules les sciences susceptibles d’application immédiate à l’amélioration des conditions matérielles de la vie sont jugées par eux dignes d’intérêt. La philosophie, la psychologie, les mathématiques, etc, leur apparaissent comme un vain bavardage.

C’est tout à fait regrettable, mais il faut franchir ce stade, à la longue, les cerveaux finiront par s’éclairer, une élite se créera, qui viendra à la di-