Page:Pellissier - Le Mouvement littéraire contemporain, 1908.djvu/190

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Quel défaut pourrait-on reprocher à l’auteur des Trophées ? Nul autre que celui d’être continûment « parnassien ». Aussi impersonnel que possible, ce qui nous apparaît de lui, c’est au moins sa propre vision des choses, toujours éclatante et radieuse. Il peint la Grèce avec le même faste que l’Espagne ; il prodigue les couleurs dans une scène bretonne comme dans un tableau de l’Extrême-Orient. La douceur lui fait défaut, et la souplesse, le molle atque facetum, ce que Sainte-Beuve appelle quelque part « le léger de la Muse ». Nous ne trouvons pas chez lui de demi-teintes ; sa poésie ignore ces retraits d’ombre, qui abritent le rêve. Elle manque de mystère. Disant tout en perfection, elle ne laisse rien de vague, rien d’inachevé, rien dont l’écho se prolonge dans notre cœur. Elle consiste surtout, jusque dans sa rutilance, à noter les choses.


Et telle est bien l’idée que se faisait le Parnasse de l’art poétique. La poésie des parnassiens a pour caractère essentiel son réalisme. De là, l’impersonnalité à laquelle ils se sont astreints. De là, la rigueur de leur facture. Quelques-uns, Théophile Gautier par exemple, qui fut leur premier maître, se sont attachés uniquement à la beauté formelle, sans autre matière de versification que l’apparence même des objets. « Je suis, disait-il, un homme pour lequel le monde visible existe. » De là, aussi, la vérité de leurs descriptions, soit que, comme M. François Coppée, ils reproduisent des paysages ou des scènes de la vie