Page:Pellissier - Le Mouvement littéraire contemporain, 1908.djvu/193

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tion héréditaire, il n’en est pas moins vrai que les novateurs pouvaient retrouver des devanciers chez quelques-uns de nos plus illustres poètes. Avant Malherbe, nous avions eu Ronsard ; après Corneille, nous avions eu Racine, Or, tandis que les vers des Malherbe et des Corneille sont beaux comme de la prose, il y a souvent dans ceux de Racine et de Ronsard quelque chose qui n’est pas sans rapport avec le symbolisme. Et n’oublions pas d’ailleurs les romantiques, auxquels la jeune école ne fit parfois que revenir.

Comment expliquer la manière dont le symbolisme conçoit la poésie ? Telle qu’il l’entend, la poésie a pour objet, non pas de noter avec précision des formes déterminées, mais d’évoquer « l’âme des choses ». Devant un paysage, le parnassien rendra en termes aussi exacts, aussi nets que possible, tout ce que perçoit son œil ; le symboliste, découvrant sous les apparences sensibles ce qu’elles cachent de mystérieux, traduira la « correspondance » de ce paysage avec son âme, car l’âme des choses, à vrai dire, c’est l’âme même du poète. « L’enfantillage de la littérature jusqu’ici, déclare un des initiateurs du symbolisme, a été de croire, par exemple, que choisir un certain nombre de pierres précieuses et en mettre le nom sur le papier, même très bien, c’était faire des pierres précieuses. Eh bien, non ! La poésie consistant à créer ; il faut prendre dans le « moi » humain des états, des lueurs d’une pureté si absolue, que, bien chantés et bien mis en lumière, cela constitue en effet les joyaux de l’homme. Là, il y a symbole, il