Page:Pellissier - Le Mouvement littéraire contemporain, 1908.djvu/195

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temps de plus profond dans l’âme humaine. Or, c'est là justement le domaine particulier de la poésie symboliste. Aussi emprunte-t-elle à la musique ses moyens et ses effets. Quand on veut « suggérer » ou « évoquer », on emploie les mots non seulement comme des signes logiques, mais aussi comme des sons et presque comme des notes.

Pour être un poète symboliste, il n'est pas nécessaire de faire proprement ce qu'on appelle des symboles, il suffit d'exprimer les secrètes correspondances des choses avec notre âme. Mais une poésie qui a ces correspondances pour objet sera le plus souvent symbolique, car, dès que nous les suivons avec quelque teneur, elles revêtent la forme du symbole.

Qu'est-ce donc que le symbole ? Distinguons-le de la comparaison et de l'allégorie. Tandis que la comparaison envisage deux termes en les maintenant éloignés l'un de l'autre, le symbole associe ces deux termes intimement, et, pour mieux dire, les confond. Quant à l'allégorie, elle se rapproche beaucoup moins du symbole que de la comparaison même ou de la métaphore. À l'idée déjà conçue par l'esprit d'une façon purement abstraite, elle superpose ou substitue une image tirée du monde extérieur ; elle n'est guère, par suite, qu'une comparaison ou une métaphore systématiquement prolongée. Le symbole est tout autre chose. Il éclôt, sans réflexion, sans analyse, dans une âme simple qui ne distingue même pas entre les apparences matérielles et leur signification idéale. Sans doute,