Page:Pellissier - Le Mouvement littéraire contemporain, 1908.djvu/233

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On ne peut dire qu’Albert Samain soit proprement un symboliste. Mais ce qu’il y a chez lui de plus intime est tout à fait de notre temps, si nous ne le cherchons pas dans tels poèmes, compliqués ou prestigieux, du Jardin de l’Infante, ni même dans les idylles nettes et pures d’Aux flancs du vase, si nous le trouvons, comme je crois, dans celles de ses pièces qui sont d’un élégiaque très subtil et en même temps très doux.


M. André Rivoire n’appartient pas non plus à l’école symboliste. Sa métrique observe les règles consacrées et sa composition n’a presque jamais rien de symbolique. Il n’en faut pas moins le ranger, ainsi qu’Albert Samain, dans le groupe de ceux qui ont renouvelé notre poésie. Moins passionné que sentimental, M. Rivoire a horreur du faste, du bruit, de l’éclat, il aime ce demi-jour où les choses paraissent atténuées et lointaines. Sa saison favorite est l’automne, et son heure de prédilection est le soir. À peine éclairés par une pâle lumière, ses paysages semblent, non pas la transcription du monde visible, mais un reflet d’âme, le reflet d’une âme plaintive. L’amour, chez lui, ne connaît point les ivresses et les transports ; c’est un amour indécis, timide, hésitant. Celle qu’il chante, svelte et gracile, nous apparaît sous une forme presque immatérielle, comme en un rêve. Entre elle et lui, c’est, plutôt que de l’amour à vrai dire, une sorte d’affinité morale. Les pièces de M. André Rivoire ont une grâce mélancolique et fine.