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Parmi les « provinciaux » et les « rustiques », il faut en signaler au moins quelques-uns. M. André Theuriet est le peintre aimable et gracieux des Ardennes. Gabriel Vicaire a rendu les mœurs et les types de la Bresse en vers d’un réalisme pittoresque où s’attendrit par instants la gaîté paysanne. M. Le Goffîc et M. Le Braz sont tous deux Bretons : le premier exprime avec précision, en traits justes et fins les aspects du pays natal ; le second demande ses inspirations aux vieilles légendes d’Armor, et la sensibilité de l’âme bretonne n’a pas de plus fidèle, de plus délicat interprète.

En renouvelant la chanson rustique et populaire ces poètes se conformaient au sens général de l’évolution poétique durant la dernière partie du siècle. On peut seulement regretter qu’ils observent jusque dans ce genre les règles de notre poésie savante. Trop soumis à la discipline traditionnelle, et, par suite, trop attentifs à la pureté, à l’élégance du style, ou même à la coordination des idées, ils ne font guère, après tout, que des pastiches littéraires. Le caractère intime de la chanson populaire et rustique, c’est une spontanéité de sentiment qui a pour expression naturelle des synthèses brusques et discontinues[1].

  1. Cf. le Lyrisme sentimental et la Poésie populaire, par Robert de Souza. — On trouve de vraies chansons populaires, et non plus des chansons littéraires, chez maints symbolistes, Verlaine d’abord, M. Vielé-Griffin, M. Verhaeren, etc. Indiquons aussi les Ballades françaises de M. Paul Fort.