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Page:Pellissier - Voltaire philosophe, 1908.djvu/134

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RELIGION

vêtus de noir qui s’efforcent de changer les hommes en bêtes » (Lettre à Marmontel, 28 janv. 1764). Après avoir dit dans l’Essai sur les Mœurs que le concile de Toulouse défendit aux chrétiens laïques de lire les Écritures, il ajoute : « On fit brûler les ouvrages d’Aristote… Des conciles suivants ont mis Aristote presque à côté des Pères de l’Église. C’est ainsi que vous verrez… les sentiments des théologiens, les superstitions des peuples, le fanatisme, variés sans cesse, mais toujours constants à plonger la terre dans l’abrutissement » (XVI, 253).

Jeannot veut-il faire son salut ? Qu’il se garde avant tout de penser. « Souviens-toi, lui dit le père Nicodème,

 
Souviens-toi bien que la philosophie
Est un démon d’enfer à qui l’on sacrifie…

Tout chrétien qui raisonne a le cerveau blessé ;
Bénissons les mortels qui n’ont jamais pensé.

(XIV, 236[1].)


Pour faire son salut, Jeannot n’a qu’à s’entretenir pieusement dans l’ignorance et la bêtise.

  1. Après avoir raconté l’histoire d’un hibou, qui, porté par un aigle vers le soleil, en perd la vue et devient la pâture des bêtes de proie, le père Nicodème ajoute :

    Profite de sa faute, et, tapi dans ton trou,
    Fuis le jour à jamais en fidèle hibou.


    Et, comme Jeannot manifeste l’envie de raisonner : « Ah ! lui dit-il,

    Ah ! te voilà perdu ! Jeannot n’est plus à moi.
    Tous les cœurs sont gâtés, l’esprit bannit la foi,
    L’esprit s’étend partout. Ô divine bêtise !
    Versez tous vos pavots, Soutenez mon église.

    (Le Père Nicodème et Jeannot, XIV, 238, 239.)


    Cf. la Pucelle, chant iii :

    Ah ! qu’aux savants notre France est fatale !
    Qu’il y fait bon croire au pape, à l’enfer,
    Et se borner à savoir son Pater !

    (XI, 58.)


    Cf. encore, dans le pamphlet intitulé De l’horrible Danger de la