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RELIGION

ou prédicants qui tenaient des assemblées malgré les lois ; et, depuis 1745, il y en a eu six de pendus » (Dict. phil., Église, XXIX, 27). « Nous envoyons encore quelquefois à la potence de pauvres gens du Poitou, du Vivarais, de Valence, de Montauban. Nous avons pendu depuis 4745 huit personnes de ceux qu’on appelle prédicants ou ministres de l’Évangile, qui n’avaient d’autre crime que d’avoir prié Dieu pour le roi en patois et d’avoir donné une goutte de vin et un morceau de pain levé à quelques paysans imbéciles » (Traité sur la Tolérance, XLI, 286). « On vient de condamner à être pendu un pauvre diable de Gascon qui avait prêché la parole de Dieu dans une grange, auprès de Bordeaux. Le Gascon maître de la grange est condamné aux galères, et la plupart des auditeurs Gascons sont bannis du pays » (Lettre à Damilaville, 30 oct. 1767).

Voltaire ne se lassa jamais de flétrir ces crimes de l’intolérance. Et, chaque fois qu’il en eut l’occasion, il intervint pour les persécutés. Sans parler, ici non plus, des Calas et des Sirven, combien d’autres malheureux n’a-t-il pas défendus contre le fanatisme ?

Ce furent, par exemple, les Espinas, qu’il finit par sauver[1] ? C’était, quelques années avant, le pasteur

  1. « Je pris la liberté de vous remettre, écrivait-il à Mme de Saint-Julien, une petite requête pour M. de Saint-Florentin [ministre d’État] en faveur d’une malheureuse famille huguenote. Le père a été vingt-trois ans aux galères pour avoir donné à souper et à coucher à un prédicant ; la mère a été enfermée, les enfants réduits à mendier leur pain » (14 sept. 1766). « J’abuse, écrivait-il à Richelieu, de votre générosité. Daignerez-vous l’employer pour une famille entière du pays que vous avez gouverné ? J’ai déjà pris la liberté d’implorer vos bontés pour les d’Espinas… réduits à l’état le plus cruel après vingt-trois ans de galères pour avoir donné à souper à un prédicant. Si on ne