pas manqué. Il écrit à Damilaville que sa tragédie des Scythes est « une opposition continuelle » entre les mœurs d’un peuple libre et les mœurs des courtisans (17 déc. 1766); et, dans la préface de cette pièce, il déclare avoir voulu mettre « l’état de nature » en contraste avec « l’état de l’homme artificiel » (VIII, 189). Voici comment le Scythe Indatire parle au prince d’Ecbatane, Athamare :
Que l’homme soit esclave aux champs de la Médie,
Qu’il rampe, j’y consens ; il est libre en Scythie.
Au moment qu’Obéide honora de ses pas
Le tranquille horizon qui borde nos États,
La liberté, la paix, qui sont notre apanage,
L’heureuse égalité, les biens du premier âge,
Ces biens que des Persans aux mortels ont ravis,
Ces biens, perdus ailleurs et par nous recueillis,
De la belle Obéide ont été le partage.
Mais, même dans les Scythes, Voltaire n’adopte pourtant pas la théorie de Rousseau. Et ces Scythes que glorifie Indatire, Obéide nous les peint comme des brutes et des monstres[1].
- ↑ Cf. Essai sur les Mœurs : « Pourquoi Quinte-Curce, en parlant des Scythes,… met-il une harangue philosophique dans la bouche de ces barbares ? Pourquoi suppose-t-il qu’ils reprochent à Alexandre sa soif de conquérir ? Pourquoi leur fait-il dire qu’Alexandre est le plus fameux voleur de la terre, eux qui avaient exercé le brigandage dans toute l’Asie si longtemps avant lui ?… Il parle du prétendu désintéressement des Scythes en déclamateur.
« Si Horace, en opposant les mœurs des Scythes à celles des Romains, fait en vers harmonieux le panégyrique de ces barbares,… c’est qu’Horace parle en poète un peu satirique, qui est bien aise d’élever des étrangers aux dépens de son pays. C’est par la même raison que Tacite s’épuise à louer les barbares Germains… Les Scythes sont les mêmes barbares que nous