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Page:Pellisson - Chamfort, 1895.djvu/241

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Révolution, parce que la liberté ne pouvait dater vraiment que du jour où la royauté serait abolie. Et il fut ainsi ce que nous appellerions un républicain de la première heure. Dès juillet 1789, n’écrivait-il pas à Mme Agasse ; « Voulez-vous bien vous charger de tous mes compliments pour M… (Pankoucke), et le prier de rendre le Mercure un peu plus républicain ? Il n’y a plus que cela qui prenne[1]. » À peu près à la même époque, Marmontel ne nous le signale-t-il pas comme un des « plus outrés partisans de la faction républicaine » ?

Il est certain que n’eût-il pas fait tout haut sa profession de foi, son opinion pourrait encore ressortir assez clairement pour nous de ce qu’il dit et écrivit durant la Constituante. Tout en ayant toujours professé un respect sincère pour la personne de Louis XVI, il ne cessa de tenir en défiance le gouvernement de la cour. Il rendait volontiers hommage aux qualités privées du roi. Mais « qu’importe, disait-il, un Tibère ou un Titus sur le trône, s’il a des Séjan pour ministres[2] ? » On voit sans peine, dans ses articles sur les Mémoires secrets de Duclos, sur les Mémoires de Richelieu, qu’il est constamment préoccupé de détruire ce prestige de la monarchie dont il jugeait que les Français étaient comme aveuglés. C’est à grand’peine qu’il excuse Voltaire d’avoir pu « composer son Siècle de Louis XIV dans un esprit et sur des principes si peu favorables aux vrais intérêts de l’humanité[3] ».

  1. Ed. Auguis, V, 306.
  2. Ed. Auguis, I, 437.
  3. Ed. Auguis, II, 75.