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Page:Pellisson - Chamfort, 1895.djvu/26

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et d’une constante impropriété. Les premiers vers de Chamfort ne font nullement prévoir qu’il doive jamais devenir poète ; il ne le devint point en effet. Mais son premier mot, à son retour d’Allemagne, annonçait un homme d’esprit : « Je ne sache pas de chose, dit-il, à quoi j’eusse été moins propre qu’à être un Allemand[1]. »

Revenu à Paris, la pauvreté l’y attendait ; mais elle ne l’effrayait point. Il semble que, dès ce moment, il ait dû venir en aide à Thérèse Croiset : gros souci et lourde charge pour un jeune homme de vingt ans, qui n’avait d’autres ressources que sa bonne mine et son courage. Il fit donc sans hésiter toutes les besognes qui s’offrirent à lui. En échange de quelques louis, il écrivait des sermons pour le compte d’un de ses anciens camarades, devenu homme d’église ; nous le voyons à un moment dernier clerc chez un procureur. Vers le même temps il accepta un préceptorat ; mais, cette fois, il n’avait plus affaire à un Van Eyck. La mère de son élève était une veuve de vingt-cinq ans. Sélis nous conte gaiement comment finit la seconde expérience pédagogique de Chamfort. La veuve, voulut elle aussi, prendre des leçons au jeune professeur : « L’écolière devint amante et amante heureuse. Une sirène de soubrette de même. Une autre encore. Leur maîtresse vit la trahison. En mère sensible elle dit : « Pardon, Monsieur, il faut nous séparer. Vous êtes infidèle à nos conventions ; toutes les fois que vous faites étudier mon fils, il maigrit. — Et moi

  1. Ed. Auguis, II, 155.