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Page:Pellisson - Chamfort, 1895.djvu/264

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CHAMFORT

estime que la Révolution ne saurait être un simple changement dans le mode de gouvernement : sans une réforme morale la réforme politique sera illusoire et avortera : « Les Français, en se donnant une Constitution plus forte que ne l’était la nation à l’époque où elle se l’est donnée, se sont mis dans la nécessité de hâter leur marche vers des mœurs simples et fortes, dignes de cette Constitution »[1].

Chamfort travailla-t-il à l’organisation de cette éducation nouvelle dont il comprenait si bien toute la portée ? — Un témoignage, non sans valeur, fait de lui un des premiers et des meilleurs ouvriers de cette grande entreprise que la Révolution poursuivit sans la pouvoir mener à terme. Il serait, au dire de Vincent Arnault, le rédacteur, ou tout au moins l’un des rédacteurs, du Rapport sur l’Instruction publique présenté par Talleyrand à l’Assemblée nationale en septembre 1791.

« Sa signature (celle de Talleyrand), dit Arnault, n’est qu’une faible garantie pour quiconque est un peu au courant de ses habitudes. Ne se trouve-t-elle pas au bas de quantité de travaux soit sacrés, soit profanes, soit théologiques, soit philosophiques, soit diplomatiques, tels que mandements, monitoires, textes, rapports, voire certains rapports sur l’organisation de l’instruction publique, lesquels ne sont pas plus sortis de la plume de Son Altesse que le texte de certain contrat de mariage, auquel sa signature se trouve aussi ? À défaut de feu Chamfort, l’abbé Desrenaudes qui n’est pas mort et tel homme qui vit encore, pourraient nous donner sur tout cela d’utiles éclaircissements ; mais le premier est discret comme un confesseur, et quant au second, qui sait tout le prix d’un se-

  1. Ed. Auguis, III, 328.