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Page:Pelloutier - Histoire des bourses du travail, 1902.djvu/40

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préface

que serait-ce donc si elles avaient à s’occuper du détail de la production ?

Dans toutes ces utopies, on admettait que les faits historiques se développent comme conséquences du principe — à peu près comme les propositions de géométrie s’alignent à la suite des axiômes. On peut encore dire qu’on regardait la vie sociale d’un pays comme déterminée par son espèce constitutionnelle, comme les mœurs des animaux sont déterminées par leurs espèces naturelles ; et à cette époque les zoologistes s’occupaient plutôt de décrire l’ensemble des actes se rapportant à l’être typique que de rechercher des lois physiologiques. Mais si puissantes que soient les analogies logiques, elles ne sauraient suffire pour expliquer l’illusion de nos pères ; il faut tenir compte des considérations sur lesquelles avait été fondée jusque-là l’étude historique : on avait surtout cherché à connaître la manière de vivre des gens entourant soit le pape, soit le roi ; toute réforme sociale avait été conçue comme une réforme morale des cours ; l’éducation des princes avait été le grand objet des méditations des philosophes ; — ajoutons que la Révolution avait été une suite de journées et de coups d’État, et enfin que Napoléon avait donné à l’autorité un éclat incomparable.

Une fois de plus, il faut tenir compte de l’influence des guerres de la Révolution ; ces guerres constituent le fait capital de l’histoire du xixe siècle et elles pèsent encore sur nous ; il y eut une nouvelle conquête de la France par le pouvoir central et la notion d’autorité se trouva régénérée par la guerre. Quand la paix survint, les idées unitaires se trouvaient plus fortes qu’elles n’avaient jamais été ; tout le monde se tournait vers le pouvoir pour lui demander d’or-


    conserver les illusions saint-simoniennes ; on peut douter que ces manieurs de bouquins aient en industrie la haute compétence qu’ils s’attribuent.