Page:Pensées de Gustave Flaubert 1915.djvu/66

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en passant jusqu’au dernier lambeau de votre vêtement ; la terre est perdue pour toujours, et le but sans doute ne s’atteindra pas. C’est l’heure où l’on compte ses fatigues, où l’on regarde avec épouvante les gerçures de sa peau. L’on n’a rien qu’une indomptable envie de monter plus haut, d’en finir, de mourir. Quelquefois, pourtant, un coup des vents du ciel arrive et dévoile à votre éblouissement des perfections innombrables, infinies, merveilleuses ! A vingt mille pieds sous soi, on aperçoit les hommes, une brise olympienne emplit nos poumons géants et l’on se considère comme un colosse ayant le monde entier pour piédestal. Puis le brouillard retombe et l’on continue à tâtons ! s’écorchant les ongles aux rochers et pleurant de la solitude ! N’importe ! mourons dans la neige, dans la blanche douleur de notre désir, au murmure des torrents de l’Esprit, et la figure tournée vers le soleil !

Au-dessus de la vie, au-dessus du bonheur, il y a quelque chose de bleu, d’in-