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M. PASCAL.

Sans ces divines connoiſſances qu’on pû faire les hommes, ſinon ou s’élever dans le ſentiment interieur qui leur reſte de leur grandeur paſſée, ou s’abbattre dans la veüe de leur foibleſſe preſente ? Car ne voyant pas la verité entiere ils n’ont pû arriver à une parfaitte vertu ; les uns conſiderans la nature comme incorrompuë, les autres comme irreparable. Ils n’ont pas pû fuïr ou l’orgueüil, ou la pareſſe, qui ſont les deux ſources de tous les vices ; puiſqu’ils ne pouvoient ſinon ou s’y abandonner par laſcheté, ou en ſortir par l’orgueüil. Car s’ils connoiſſoient l’excellence de l’homme, ils en ignoroient la corruption ; de ſorte qu’ils évitoient bien la pareſſe, mais ils ſe perdoient dans l’orgueüil. Et s’ils reconnoiſſoient l’infirmité de la nature, ils en ignoroient la dignité ; de ſorte qu’ils pouvoient bien éviter la vanité, mais c’eſtoit en ſe précipitant dans le deſeſpoir.

De là viennent les diverſes ſectes des Stoïciens & des Epicuriens, des Dog-r