sont-ils pas tous également des brigands[1] et des voleurs[2] ?
XI
Il faut se rendre bien compte, par une étude méthodique, de la manière dont les choses se changent les unes dans les autres ; applique-toi sans cesse à cette question, et fais-en spécialement le constant exercice de ta pensée. Rien n’est plus propre à élever l’âme[3] ; elle se dépouille du corps[4] ; et quand l’homme songe qu’il va falloir dans un instant quitter tout cela, en sortant de la société de ses semblables, il se consacre tout
- ↑ Des brigands. Au temps de Marc-Aurèle, c’était là une idée bien neuve et bien hardie.
- ↑ Et des voleurs. Il n’y a dans le texte grec qu’un seul mot, qui a la force des deux que j’ai dû employer. — Cette réflexion de Marc-Aurèle a déjà le ton et le tour que plus tard doit prendre Pascal, sans connaître sans doute son prédécesseur.
- ↑ Rien n’est plus propre à élever l’âme. En lui faisant voir la mobilité perpétuelle de toutes choses, et la vanité de nos passions et de nos intérêts.
- ↑ Elle se dépouille du corps. C’est la doctrine platonicienne, qui fait de la philosophie l’apprentissage de la mort. L’âme peut le réaliser à peu près dès cette vie,
intérêt général de nation ; mais plus tard ce noble but s’efface aux yeux de l’armée ; l’intérêt individuel prend le dessus ; et c’est alors une sorte de pillage organisé. Après plusieurs campagnes, Alexandre est obligé de faire brûler les bagages de ses soldats, c’est-à-dire le fruit de leurs vols. Ce qu’il y a de pis, c’est que le courage décroît à mesure que la cupidité se satisfait et que la richesse augmente.