Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Barthélemy-Saint-Hilaire.djvu/84

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

car ce qu’il faut à l’homme, c’est d’être droit ; ce n’est pas d’être redressé.

VI

Si, dans la vie telle qu’elle est faite à l’homme, tu trouves quelque chose de mieux que la justice, la vérité, la tempérance, le courage[1], en un mot, que la pleine domination de ta propre pensée, se suffisant à elle-même dans les choses où elle te fait agir selon la droite raison, et se résignant à la part que lui assigne le destin dans les choses qui ne dépendent pas de notre libre arbitre, si, dis-je, tu trouves quelque chose de mieux, tourne-toi de tout ton cœur vers ce trésor[2] ; et jouis du bien incomparable que tu auras su découvrir. Mais si tu ne trouves rien de supérieur au génie qui siége au dedans de toi[3], qui a soumis à son empire toutes les passions, qui

  1. La justice, la vérité, la tempérance, le courage. Ce sont les quatre parties de la vertu dans la doctrine platonicienne.
  2. Tourne-toi de tout cœur vers ce trésor. Dans le Sermon sur la Montagne, le Christ dit : « Là où est votre trésor, là aussi est votre cœur. » Saint Matthieu, ch. VI, § 21.
  3. Au génie qui siége au dedans de toi. Voir au paragraphe précédent. La Bible a dit : « Dieu fit l’homme à son image. » Sous une autre forme, le Stoïcisme a la même pensée et une idée aussi haute de la