existent. Il suffit de se rappeler que tout est réglé par des lois[1].
32
Sur la mort. S’il n’y a que des atomes[2], elle n’est qu’une dispersion ; si le monde est un tout[3], elle n’est qu’extinction ou déplacement[4].
33
Sur la douleur. Si elle est intolérable, elle nous emporte ; si elle dure, c’est qu’elle est supportable ; la pensée peut, d’ailleurs, en s’isolant[5], assurer sa tranquillité, et le principe dirigeant demeure intact. C’est aux parties maltraitées par la douleur de dire, si elles le peuvent[6], ce qu’elles ont à dire.
34
Sur la gloire. Vois leurs[7] pensées ; vois ce qu’elles fuient et ce qu’elles poursuivent. Vois aussi comment les couches
- ↑ Ἤδη λίαν ὀλίγα. J’ai supprimé dans ma traduction ces trois mots par lesquels se termine la pensée ; je n’ai pu arriver à leur trouver aucun sens satisfaisant. — [On pourrait les entendre, à la rigueur, en donnant à λίαν un sens qu’il a assez souvent dans les Pensées (X, 7, dernière phrase ; VII, 67, seconde phrase ; VII, 24, première phrase), non celui de « trop », mais celui de « tout à fait ». « Je pense, aurait dit Marc-Aurèle, que ces préceptes sont assez peu nombreux ; » en d’autres termes : « Est-ce trop te demander ? » — Avec M. Stich, je considère comme une glose cette phrase pénible et dépourvue d’intérêt ; c’est pourquoi je ne l’ai point admise dans la traduction.]
- ↑ [Var. : « Si nous sommes faits d’atomes… ; » — plus loin : « si nous sommes un tout. »]
- ↑ J’ai suivi la correction nécessaire indiquée par Casaubon : εἰ δ´ ἔνωσις, au lieu de ἢ ἔνωσις. Il est facile de voir, d’après la construction de la phrase, comment le copiste a été conduit [l’iotacisme aidant] à écrire ἢ, au lieu de εἰ.
- ↑ [Cf. supra IV, 21, 1re et dernière notes.]
- ↑ [On peut, ce me semble, admettre cette traduction de κατ´ ἀπόληψιν. Mais j’aimerais mieux, pour ma part, lire κατ´ ἀνάληψιν, qui serait beaucoup plus clair. — Rapprocher de cette phrase le début de l’article IV, 3, et tout l’article VII, 28.]
- ↑ [Cf. VII, 16, 3e note.]
- ↑ [Sur ce mot « leurs » (en grec αὐτῶν), cf. IV, 16 ; IV, 38 ; VI, 6, et les notes.]
l’avons fait, ἕτι δὲ καί, ou ἕνιοι δέ, il ne reste plus que μόνα τὰ στοιχεῖα. Mais ces mots peuvent être conservés et l’on arrive au sens que j’ai donné : « on dit aussi que les éléments seuls existent. » Cette affirmation contredit la précédente ; elle n’est donc pas du même auteur, et c’est pour cela que j’ai écrit les mots « on dit », qui interprètent le texte. Nous nous trouvons ainsi en présence d’une idée fréquente dans Marc-Aurèle. Il répète plusieurs fois qu’il y a, pour expliquer le monde, deux hypothèses possibles : Dieu, c’est-à-dire la raison universelle, ou les atomes ; l’ordre ou le hasard. Dans les deux hypothèses, le sage doit être tranquille ; mais la plus vraisemblable des deux est la première. Marc-Aurèle dirait donc, en somme, dans le passage qui nous occupe : « L’un prétend que tout est réglé par des lois, l’autre qu’il n’y a que des éléments. Il suffit, pour la conduite de la vie, de se rappeler la première de ces affirmations. » Ainsi le texte peut s’expliquer aisément, si, en touchant à peine au texte donné par les manuscrits, on sous-entend φασὶν ou φησὶν dans la seconde proposition.