Comment se comporte le principe dirigeant de ton âme ? Tout est là. Le reste, que tu le veuilles ou non, n’est que cadavre et fumée[1].
Même ceux[2] qui considèrent le plaisir comme un bien et la douleur comme un mal ont cependant méprisé la mort[3]. Est-il rien qui puisse mieux nous encourager à la mépriser ?
Celui qui pense que cela seul est bien[4] qui arrive en sa saison, et à qui il est indifférent d’avoir accompli plus ou moins d’actions conformément à la raison [droite], et d’avoir regardé le monde plus ou moins longtemps[5], celui-là ne craint pas non plus la mort.
Homme, tu as été citoyen de cette grande cité : que t’importe de l’avoir été pendant cinq ans ou pendant trois ans ? Tout ce qui est conforme à la loi est égal pour tous. Est-il donc si terrible d’être renvoyé de la cité, non par un tyran ni par un juge injuste, mais par la nature qui t’y avait introduit ? C’est comme si un chorège[6] congédiait de la scène l’acteur qu’il y avait reçu ! « Mais je n’ai pas joué les cinq actes de la pièce, je n’en ai joué que trois. — C’est vrai ; mais,
- ↑ [Cf. supra X, 31, note 3.]
- ↑ [Couat : « Les philosophes qui… »]
- ↑ [Couat : « ont cependant méprisé la douleur. Est-il rien qui puisse mieux nous encourager à mépriser la mort?» — Pierron: «Une chose peut… nous exciter au mépris de la mort…, c’est qu’ils ont pourtant méprisé la volupté. » — Marc-Aurèlc: πρὸς θανάτου καταφρόνησιν ὲνεργικώτατον ὅτι καὶ οί τὴν ἡδονὴν ὰγαθὸν καὶ τὸν πόνον κακὸν κρίνοντες, όμως τούτου κατεφρόνησαν. A quoi se rapporte τούτου ? à ὰγαθὸν, à πόνον ou à θανάτου ?]
- ↑ [Cf. supra IV, 23.]
- ↑ [Cf. supra VI, 23; XI, i, etc.; en dehors des Pensées, toute la lettre ij3 de Sénèque à Lucilius, et Plutarque (Comm. not., 8: αγαθών ό χρόνος ουκ αύξει προςγιγνόμενος. Cette doctrine est opposée à celle d’Aristote. Elle est peut-être en contradiction, comme l’a noté Plutarque, avec une proposition de Chrysippe, considérant comme sans valeur un bonheur ou une sagesse d’un moment.]
- ↑ [Conjecture de Nauck : χορηγός pour στρατηγός.]
