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herbes et racines sauvages, avec un bon verre d’eau de fontaine, c’est à peu près ma seule nourriture. Mon jardin, c’est l’immense forêt de Chateaubriand, « aussi antique que la terre qui la porte », le long du plus grand fleuve de l’univers ; c’est une immense prairie, semblable à une vaste mer, où la gazelle, le chevreuil, la biche, le buffle, le bison, paissent en liberté…

» Ma carabine m’accompagne toujours dans mes courses, car il faut se tenir en garde contre les attaques de l’ours à l’ongle rouge et des loups affamés, qu’on rencontre pour ainsi dire à chaque pas. D’ailleurs, les guerres que se livrent entre eux les sauvages rendent notre vie très précaire. Des bandes d’Otoes, de Pawnees, de Sioux, rôdent dans tous les sens pour enlever des chevelures. Nos nouvelles de chaque jour consistent à entendre le récit de leurs cruautés ».[1]

Dans ce milieu barbare, le missionnaire trouve le moyen de faire revivre les chers absents : « Parmi les convertis, se trouve l’épouse du grand chef, que j’ai appelée Rosalie. Il y a déjà par ici plusieurs François, des Charles, des Antoine, des Pierre, des Jeannette, des Marie, des Sophie, des Thérèse. Tous ceux que j’ai baptisés portent le nom de quelqu’un de ma famille ou de ma connaissance ».[2]

Il redevient enfant en répondant au petit Charles, son neveu préféré :

« Quand je me promène dans les prairies, parmi les belles fleurs, je me dis souvent : Si Charles, Sylvie, Elmire, Clémence et la petite Rosalie étaient ici, quels beaux

  1. À François De Smet. — 30 mai 1839.
  2. À François De Smet. — 11 sept. 1838.