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Le P. De Smet observe, avec un particulier intérêt, des groupes de sauvages de diverses tribus, jadis paisibles possesseurs des prairies, maintenant refoulés dans les gorges et les forêts.

« Peut-être ce pays sera-t-il un jour le berceau d’un nouveau peuple, composé des anciennes races sauvages et de cette classe d’aventuriers, de fugitifs et de bannis, que la société rejette de son sein : population hétérogène et menaçante, que l’Union Américaine amoncelle comme un sinistre nuage sur ses frontières, et dont elle accroît sans cesse l’irritation et les forces, en transportant des tribus entières d’Indiens, de l’est du Mississipi, dans les solitudes de l’Ouest. Ces sauvages emportent avec eux une haine implacable contre les Blancs qui les ont, disent-ils, injustement chassés loin des tombeaux de leurs pères et dépossédés de leur héritage… N’est-il pas à craindre qu’avec le temps, ces tribus ne s’organisent en bandes de pillards et d’assassins, qui auront pour coursiers les chevaux légers de la Prairie, le désert pour théâtre de leurs brigandages, et des rochers inaccessibles comme asile de leur vie et de leur butin » ?[1]

L’avenir ne doit, hélas ! que trop justifier ces sombres prévisions.

Depuis un mois, on longeait la rive droite de la Nebraska. Vers la mi-juin, on atteignit les Montagnes-Rocheuses. « Ce ne sont que rochers entassés sur rochers. On dirait les ruines de tout un monde, recouvertes, comme d’un linceul, par des neiges éternelles ».[2]

La caravane devait s’arrêter à la Rivière-Verte, une

  1. Relation citée. — Cf. W. Irving, Astoria, XXII.
  2. Ibid.