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Le missionnaire recourt à un expédient qui rappelle les aventures de sa jeunesse : « Je me souvins que nous avions parmi nos bêtes une vieille mule assez prudente et pas trop vicieuse. Je m’attachai à sa queue et tins ferme. Excitée par quelques cris et coups de fouet, elle me traîna patiemment jusqu’au sommet… Pour descendre, je changeai de position. Je m’accrochai à la bride de ma mule qui, continuant à avancer pas à pas, me déposa sain et sauf au pied du rocher ».[1]

Le lendemain, on entra dans une forêt de pins et de cèdres, qu’on mit trois jours à traverser.

« Cette forêt, dit le missionnaire, est, dans son genre, une véritable merveille. Les sauvages disent que c’est la plus belle de l’Orégon. Il serait, en effet, difficile de trouver ailleurs des arbres aussi gigantesques. Du milieu des bouleaux, des aunes et des hêtres, le cèdre dresse sa tête altière, et les surpasse tous en grandeur. J’en ai mesuré un qui avait quarante-deux pieds de circonférence ; un autre, qui se trouvait à terre, avait plus de deux cents pieds de long. Les branches de ces colosses s’entrelacent au-dessus des hêtres et des bouleaux, formant une voûte si touffue que les rayons du soleil ne pénètrent jamais à leur base, tapissée de mousse et de lychnis. À voir, sous ce dôme toujours vert, les troncs s’élancer par milliers, comme autant de colonnes majestueuses, on dirait un temple immense, élevé par la nature à la gloire de son Auteur ».[2]


Au sortir de la forêt apparut le lac des Kalispels, avec ses îlots couverts de pins, ses bords échancrés, son horizon

  1. Lettre à un Père de la Compagnie de Jésus. — Sainte-Marie, 8 déc. 1841.
  2. Ibid.