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traversée, qui allait durer sept mois, ménageait aux missionnaires d’autres épreuves.

La moindre devait être celle de l’ennui. Bien qu’il eût le goût des voyages, le P. De Smet n’y échappa point. « La vie de mer, dit-il, est triste et monotone. Toujours de l’eau ; de loin en loin une voile ; çà et là quelques oiseaux, quelques poissons, qui viennent vous arracher pour un instant à vos rêves lointains ; un orage, une tempête, des écueils dangereux, des rochers escarpés, qui vous font frémir, lorsque l’impétuosité du vent vous y pousse, et que toute manœuvre devient impossible »[1].

Le missionnaire, alors, reporte sa pensée vers les êtres chéris qu’il vient de quitter pour ! a troisième fois : « Souvent, assis sur le pont, quand la nuit est belle et tranquille, je passe des heures entières à suivre des yeux les étoiles, et à y retrouver mes souvenirs les plus doux. Le Baudrier d’Orion, vulgairement appelé les Trois Rois, me rappelle mes deux frères et ma sœur. En voyant la Chevelure de Bérénice, je m’imagine être au milieu de tous les enfants de la famille ; je les reconnais, je les entends, ils me sautent au cou et sur les genoux ; vous savez combien je les aime »[2] !

Au moment de doubler le cap Horn, le navire qui, jusque là, avait assez bien tenu la mer, faillit une première fois sombrer.

« Du 22 au 30 mars, écrit le P. Vercruysse, nous essuyâmes une furieuse tempête. Les voiles, bien que pliées, volèrent en lambeaux ; rien ne tenait contre l’ouragan. Des montagnes d’eau s’élevaient à une hauteur prodi-

  1. Lettre à François De Smet. — Valparaiso, ler mai 1844.
  2. Lettre à François De Smet. — Sainte-Marie de Willamette, 9 oct. 1844.