Page:Pere De Smet.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quelle joie alors ! quels transports d’allégresse ! quelles actions de grâces dans nos cœurs et sur nos lèvres !… Impossible de dire ce que nous ressentions à la vue de cet immense pays où, faute de missionnaires, des milliers d’hommes naissent, grandissent et meurent dans les ténèbres de l’infidélité : malheur auquel nous allions mettre un terme, sinon pour tous, du moins pour un grand nombre ».[1]

Mais il semble que l’Esprit du mal s’acharnât à retenir loin du port ceux dont il redoutait les conquêtes.

« L’embouchure du Columbia, continue le P. De Smet, est d’un accès difficile et dangereux, même pour les marins munis de bonnes cartes ; or, notre capitaine n’avait pu s’en procurer… On ne tarda pas à découvrir d’énormes brisants, signe certain d’un banc de sable de plusieurs milles d’étendue. Les écueils traversent le fleuve dans toute sa largeur, et forment une barre qui semble en interdire l’entrée.[2]

» C’était le 31 juillet, fête de saint Ignace. Cette coïncidence ranima nos espérances et releva nos courages.

» Bientôt la chaloupe, envoyée pour sonder les brisants, rejoignit l’Infatigable. Les visages tristes et découragés des matelots annonçaient de mauvaises nouvelles ; on n’osait les interroger. Cependant le lieutenant dit au capitaine qu’il n’avait pas trouvé d’obstacles, et qu’il avait traversé la barre avec cinq brasses d’eau. Alors on déploya les voiles, et le navire s’avança, poussé par une légère brise.

  1. Lettre à François De Smet. — Sainte-Marie de Willamette, 9 octobre 1844.
  2. Depuis lors, le gouvernement des États-Unis a, par un système de jetées parallèles, rendu plus facile l’accès du Columbia.