Pendant deux jours, on suivit à la piste les voyageurs inconnus. Les traces paraissaient de plus en plus fraîches.
« J’envoyai, dit le Père, mes guides à la découverte. L’un d’eux revint vers le soir, disant qu’ils avaient rencontré un petit camp d’Assiniboins des Forêts, qu’ils en avaient été fort bien reçus, et que tous manifestaient un vif désir de me voir. Nous les rejoignîmes le lendemain, et fîmes route ensemble pendant quelques jours.
» Cette tribu ne comprend guère qu’une cinquantaine de familles, vivant çà et là dans les bois et les montagnes. L’agriculture leur est inconnue. Ils se nourrissent d’animaux, surtout de porcs-épics, dont la région fourmille. Lorsque la faim les presse, ils ont recours à des racines, à des graines, et à l’écorce intérieure du cyprès… Le chef du camp m’a raconté que, l’hiver dernier, un homme de sa nation, réduit à l’extrémité, avait mangé successivement sa femme et ses quatre enfants ».
À défaut de chevaux, les Assiniboins possèdent un nombre considérable de chiens. Il serait difficile de trouver animaux plus voraces. « Un soir, j’avais négligé d’élever une palissade autour de ma tente. Je me trouvai, le matin, sans souliers, sans col à ma soutane, et avec une jambe de moins à ma culotte de peau ».
« La propreté ne figure pas parmi les vertus domestiques de l’Indien. Les Assiniboins sont sales au delà de toute expression. La vermine les dévore, et ils dévorent la vermine.
— N’as-tu pas honte, disais-je à un sauvage, de mordre ces pauvres petites bêtes ?
— Elles m’ont mordu les premières, répliqua-t-il ; j’ai droit de représailles.
« Un jour, j’assistai par complaisance à leur festin de