Page:Pere De Smet.djvu/270

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Son accoutrement le distinguait de ses compagnons. Il était couvert, des pieds à la tête, de plumes d’aigle, et portait sur la poitrine, en guise de médaillon, une grande assiette à fleurs bleues. Il me prodigua les marques d’amitié. Chaque fois que j’allais le visiter, il me faisait asseoir à côté de lui, me secouait affectueusement la main, et me frottait les deux joues avec son nez vermillonné. Il m’invita instamment à visiter son pays, s’offrant à me servir lui-même de guide et à m’introduire auprès de sa nation ».[1]

Pour les Pieds-Noirs, l’année avait été désastreuse. Vingt et un guerriers tués dans deux escarmouches avec les Têtes-Plates et les Kalispels, six cents chevaux volés et vingt-sept chevelures enlevées par les Crees, un groupe de cinquante familles massacrées par les Corbeaux, cent soixante femmes et enfants emmenés en captivité : autant de circonstances qui devaient rendre plus traitables les chefs de la farouche tribu.

La difficulté était de trouver un bon interprète. Le seul qu’il y eût au fort méritait peu de confiance ; les voyageurs n’avaient pas eu à se louer de sa fidélité. Il n’en faisait pas moins les plus belles promesses. Voulant visiter les Pieds-Noirs avant l’hiver, le P. De Smet accepta ses services. Il devait bientôt le regretter.

Le 31 octobre, il quitta le fort, accompagné seulement de l’interprète, et d’un jeune métis de la tribu des Crees, qui devait soigner les montures. Les Pieds-Noirs avaient pris les devants, pour disposer les esprits en faveur du missionnaire.

« Malgré ses promesses, écrit le Père, l’interprète ne

  1. Lettre citée.