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aux longs cheveux blancs qui, avec une noble simplicité, mendiait le pain de ses enfants. D’ordinaire, il était calme, presque froid, ennemi des démonstrations sentimentales. Venait-il à parler des Têtes-Plates ou des Cœurs-d’Alène, à exposer leurs besoins, à énumérer les inqualifiables procédés des Blancs à leur égard, aussitôt il s’animait, sa voix s’échauffait, ses paupières se gonflaient, et l’on voyait des larmes couler sur son beau visage. Alors il était éloquent et, sans peine, intéressait l’auditoire à ses missions.

Si assuré qu’il fût du succès, le P. De Smet n’aimait point à paraître en public. Chose singulière, cet homme hardi jusqu’à sembler parfois téméraire, était alors d’une incroyable timidité.

Il avait accepté de parler, à Liège, dans la petite église Sainte-Catherine. Le jour venu, il paraît tout embarrassé. — Je n’oserai pas, assure-t-il ; je ne saurais rien dire. — Vous vous montrerez, réplique-t-on ; vous direz simplement que vous recommandez vos Indiens.

Il reste indécis, et l’on doit, au dernier moment, l’arracher de sa chambre pour le conduire à l’église. Il monte en chaire, commence, raconte, s’anime ; il aurait parlé trois heures ; et l’auditoire est enchanté[1].

Avec les enfants, le P. De Smet était plus à l’aise. Il aimait les réceptions naïves que lui faisaient, chez les bonnes religieuses[2], d’innocentes fillettes de douze

  1. Le fait est raconté par le P. Broeckaert, alors supérieur de la résidence Sainte-Catherine. Cf. Précis historiques, 1873, p. 328.
  2. En particulier chez les Ursulines de Saventhem et de Thildonck, chez les Servantes de Marie d’Erps-Querbs. Cette dernière communauté avait pour supérieure une parente du P. De Smet.