Page:Pere De Smet.djvu/539

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour le plaisir de le voir. Un autre me disait qu’il donnerait tout pour l’entendre prêcher ».[1]

Le P. De Smet ne prêchait guère ; mais toujours il devenait éloquent lorsque, dans la conversation, il flétrissait les injustices commises à l’égard des Indiens.

Quelqu’un lui disait un jour :

— Comment se peut-il que vous vous plaisiez au milieu de ces affreux sauvages ?

— Affreux sauvages ! reprit-il vivement ; mais vous ne savez pas ce que vous dites ; vous ne connaissez pas ces gens simples et bons. J’ai rencontré plus de sauvages dans les grandes villes d’Amérique et d’Europe que dans les plaines et les déserts de l’Ouest…

» Quoi d’étonnant, ajoutait-il, si les Indiens estiment médiocrement les bienfaits de notre civilisation ? Ils en jugent d’après les vices que les Blancs étalent sous leurs yeux. Et quel moyen ont-ils d’apprécier la conduite des agents américains, sinon le souvenir d’avoir été souvent volés par eux[2] ?

Cette franchise de langage ne blessait personne. Protestants et catholiques, officiers et hommes d’État, professaient pour le missionnaire une singulière estime.

Parmi ceux qui lui témoignèrent le plus d’amitié, il faut citer le docteur Linton, presbytérien converti, qui fut trente ans professeur à l’université de Saint-Louis. C’était un homme d’un remarquable talent, à la fois médecin, orateur et poète. Il avait voué à la Compagnie

  1. Lettre du P. Busschots au P. Deynoodt. — Saint-Louis, Vendredi Saint, 1875.
  2. Cf. Éloge funèbre du P. De Smet par Mgr Ryan, dans le Western Watchman de Saint-Louis, 31 mai 1873. Sur la religion et les mœurs des Indiens, voir Lettres choisies, 4e série, p. 120-143.