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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

de Hotze qui arrivait à Constance, les restes de l’armée de Gortschakoff tentèrent de livrer un dernier combat et furent mis en pleine déroute. Souwaroff, arrêté dans sa marche par Masséna, dut songer lui-même à la retraite. De l’avis des généraux français, elle fut admirable ; deux ou trois bataillons de grenadiers se dévouèrent pour le reste de l’armée. Mais un profond désespoir s’était emparé de l’âme du vieux général, il s’en allait couché au fond de sa kibitka[1], comme un un vieux lion blessé, et là, caché sous son manteau, il ne voulait plus se laisser voir.

Ce que l’on sait du caractère de Paul I peut faire deviner ce qu’il éprouva à la nouvelle des désastres de son armée ; son orgueil humilié, la gloire de ses armes compromise portèrent jusqu’à la folie l’excès de sa colère. Il cassa et flétrit en masse tous les officiers qui manquaient à l’armée, sans s’embarrasser qu’ils fussent morts, vivants, tués ou prisonniers. Enfin ce qui fit supposer que réellement Paul Ier avait perdu la tête, c’est qu’il envoya à toutes ses troupes l’ordre de revenir sans délai, et sans prévenir ses alliés, il

  1. Espèce de charrette dans laquelle il se faisait traîner quand le cheval le fatiguait trop.