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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

« Je vais faire les payements que tu m’as ordonnés, mettre tout en ordre et partir d’ici à quelques jours ; j’y suis bien décidée. Si je n’en avais eu la possibilité qu’au mois de décembre, je serais partie tout de même et les glaces du plus rigoureux hiver ne m’auraient pas arrêtée. Je prends mes précautions pour pouvoir entrer en Russie, et j’irai te chercher jusqu’à Kiew s’il le faut. Te voir est le premier besoin de mon cœur ; pour cela dès ma jeunesse, j’ai tout sacrifié, franchi tous les obstacles. Souffrir pour me réunir à toi ne sera pas chose nouvelle : la perte de ma santé, de ma vie, ne m’effraye pas, vivre loin de toi est ma seule épouvante ! C’est pour cela que je partirais même au milieu du froid le plus excessif, ne fut-ce que pour te voir une minute, à moins que je ne reste en chemin, et c’est ce dont je me soucie le moins. Je souris de dédain quand tu me parles froidement de ma santé ; il ne s’agit pas de vivre, il s’agit de ne pas souffrir. Tu ne connais pas encore une passion de la trempe de la mienne : quand je ne serai plus tu pourras en faire la curieuse histoire, pour servir à celle du cœur humain. Tu as vu ses commencements, ses progrès, son état de perfection, les épreuves et les maux sans nombre qui l’ont as-