Page:Pergaud-Le Roman de Miraut, 1913.djvu/19

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plus fameux fusils du canton. Il ne voulait pas croire que Lisée ne chassait plus.

« — Si c’était pas toi qui me le dises, là, en chair et en os, que t’as vendu ton flingot et ton vieux Taïaut, je pourrais pas me le figurer.

« — Qu’est-ce que tu veux ! s’excusait Lisée. J’étais pris ; les gendarmes et le brigadier forestier Martet m’avaient à l’œil ; je me connais, j’aurais pas pu me tenir et ils m’auraient sûrement repincé. Alors, tu vois le tableau, nouveau procès-verbal, plus trente francs à verser pour conserver la « kisse » et la vieille à la maison qui râle que je nous ficherais sur la paille. J’ai tout bazardé.

« — Sacré nom de Dieu ! reprenait Pépé, j’aurais jamais eu ce courage-là, moi ! C’est les lièvres de Longeverne qui doivent rien rigoler !

« — Ah ! mon vieux, m’en reparle pas, ça me fait trop mal au cœur. »

Là-dessus, la bourgeoise est venue me prendre, je les ai quittés et nous sommes partis sur le champ de foire acheter une mère brebis avec ses deux moutons pour les hiverner.

Vers deux heures, je suis repassé à l’auberge pour charger le sac de sel que ton homme y avait entreposé, mais on m’a dit que Lisée n’était plus là et qu’il était allé chez quelqu’un avec Pépé. J’ai pensé que c’était pour le cochon ;