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Page:Pergaud-Le Roman de Miraut, 1913.djvu/208

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le tonnerre éclatant et mortel d’un inopiné coup de fusil.

Miraut les suivit quand même et malgré tout, patient et fort, avec l’acharnement du vrai limier. Il les retrouvait dans leurs remises lointaines, les relançait de nouveau, les poursuivait jusqu’à épuisement et, comme il était robuste, malheur au lièvre dont les pattes n’étaient pas bonnes, dont les jarrets n’étaient pus d’acier, dont les ruses n’étaient pas originales et infaillibles. Tôt ou tard, Miraut arrivait à lui, lui cassait l’échine et le dévorait.

Cela ne traînait guère. La course l’avait affamé, la poursuite si longue, en le fatiguant, l’avait enfiévré et mis en rage et, du ventre ouvert de la victime, les tripes chaudes sortaient bientôt qu’il avalait presque sans les mâcher. Il léchait le sang avec soin, puis broyait les côtes sous ses dents, dépiautait le râble musculeux et passait au train de devant. Souvent il abandonnait la bête pour revenir, quand sa fringale n’était pas apaisée, aux cuisses de derrière fermes et charnues qu’il déglutissait jusqu’à la dernière bouchée. Il se flanqua ainsi des ventrées gargantuesques à la suite desquelles, l’estomac garni, la peau du ventre tendue, il reprenait d’un trot alourdi, après s’être préalablement orienté, le chemin de Longeverne. Il suivait rarement les