Page:Pergaud-Le Roman de Miraut, 1913.djvu/48

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Philomen et Lisée et les amis qui étaient venus faisaient gravement cercle autour de lui. Il faut avoir vu ces fronts plissés, ces yeux inquiets, ces grosses mains tremblantes pour comprendre tout ce qui peut, malgré la rudesse apparente ou réelle, fermenter de bon levain sous ces écorces tannées et dans ces cœurs frustes de paysans. Lorsque reparurent les crises et que le chien, en se raidissant, se prit à hurler, leurs yeux devinrent humides, brillants ; l’on sentait en eux de la douleur et de la colère et plus d’un qui n’osait se moucher, de crainte de paraître bête, avala silencieusement une larme en mordant sa moustache.

Quand, après douze heures atroces d’agonie, le vieux Finaud vers six heures du soir trépassa dans une crise terrible, ils partirent tous, l’un après l’autre, sans rien dire, les épaules voûtées et le dos rond, tout bêtes de cette douleur contre laquelle rien ne les avait cuirassés, tandis que Lisée, sur son canapé[1], la tête dans les mains, pleurait silencieusement son chien.

— Ah ! que non ! La Guélotte ne voulait plus de ces scènes-là chez elle, sans compter qu’un chien de chasse, ça vaut des sous, surtout quand

  1. Chez presque tous les paysans franc-comtois, il y a dans la chambre du poêle, près du fourneau, un canapé plus ou moins moelleux où l’on se repose fréquemment après le dîner du soir.